Le temps des études
18 octobre 1933
Jacques Charpentier naît au n° 10 de la rue Claude Debussy, à Paris (17ème arrondissement).
Il est le fils de Georges Charpentier, gérant de société, et de Paulette Génillier, secrétaire, tous deux grands mélomanes. Ils possèdent une importante collection d'oeuvres musicales gravées sur disques 78 tours comportant notamment les oeuvres pour orchestre, les oeuvres lyriques, la musique de chambre et la musique d'orgue de Bach, Mozart, Beethoven, Schubert, Chopin, Liszt, Franck, Debussy, Ravel, Dukas, Pierné, Roussel et les enregistrements du festival de Bayreuth 1928. Fins mélomanes, ils étudient et pratiquent l'art de la mélodie. L'ambiance musicale familiale, enrichie des trésors musicaux enregistrés, offre au jeune enfant une présence sonore, un climat de musique permanent tout à fait exceptionnels pour l'époque.
Quelques années plus tard, la famille s'établit à Montmorency (Val d'Oise, au nord de Paris).
Le jour anniversaire de ses cinq ans, ses parents lui offrent son premier cours de piano auprès de la pianiste Maria Cerati-Boutillier, à laquelle il restera attaché jusqu'à son décès en 1980. Elle lui dispensera un enseignement unifiant avec science la pratique du piano et du chant à celles de la théorie, de l'histoire de la musique et de l'analyse des oeuvres.
Aîné de deux frères, Philippe et Alain, son père lui demandera de veiller sur la famille lorsqu'il dut laisser les siens à Montmorency pour rejoindre l'armée française durant l'occupation allemande. Il a été fait prisonnier à Vittel.
1948
A son retour de captivité, son père, un peu inquiet d'une prédominance musicale dans les activités de son fils, souhaite recueillir l'avis d'un expert pour décider de son orientation. Il sollicite une entrevue auprès du compositeur Henri Büsser. Jacques Charpentier tend fébrilement ses premières partitions parmi lesquelles une Messe à quatre voix et orgue qui venait d'être jouée dans l'église de Levallois. Büsser les examine et s'adresse à Georges Charpentier : "Monsieur, si vous ne faites pas continuer la musique à votre garçon, vous êtes un criminel !"
Jacques Charpentier devient alors l'élève de Janine Rueff, compositeur et jeune Prix de Rome, qui lui enseignera l'écriture.
1951
Il est organiste suppléant à la chapelle St Benoît d'Issy-les-Moulineaux. Il se rend aux offices à l'aide d'une motocyclette.
1952
A l'âge de 19 ans, il se présente au concours d'entrée au Conservatoire national supérieur de musique (rue de Madrid), espérant être admis dans la classe de composition musicale de Tony Aubin. Par chance, il est refusé, ce qui va lui permettre l'année suivante de partir pour les Indes.
Il est pianiste remplaçant au Théâtre des Trois Baudets, à Paris 18ème.
On l'engage par ailleurs en qualité de pianiste accompagnateur (tapeur) pour les attractions programmées dans les salles de cinéma de la société Gaumont, notamment au Gaumont Gambetta, à Paris 20ème.
28 février 1953
Il épouse la cantatrice et professeur de chant Danielle Vouaux, soprano, née à Nancy. Ils auront trois enfants : Anne, Odile et Eric.
1953-54
On lui propose le poste de pianiste au Grand Hôtel de Calcutta en Inde, pour deux prestations quotidiennes de musique classique d'une durée de quinze minutes chacune. Les jeunes mariés prennent le bateau pour une aventure inoubliable. Ils arrivent à Bombay le 18 octobre 1953, le jour même de ses vingt ans.
Là-bas, Jacques Charpentier va découvrir la richesse de l'art musical indien dans les rues de Calcutta, alors capitale du Bengale. Sans parler la langue des musiciens, il tente de comprendre la grammaire de leur musique et découvre les 72 modes karnatiques. Il entreprend une correspondance assidue avec l'ethnomusicologue Alain Daniélou qui l'aidera à décrypter et à comprendre ce langage musical extraordinairement riche.
La révélation du sacré et l'apprentissage d'une autre civilisation musicale, ancestrale et toujours vivante, partagée par des centaines de millions d'individus, le fascinent autant qu'ils le bouleversent. En autodidacte, il se plonge dans l'étude de la philosophie.
1955
De retour en France, Charpentier est admis au Conservatoire national supérieur de musique de Paris dans la classe de composition de Tony Aubin et dans la classe de philosophie de la musique et d'analyse musicale d'Olivier Messiaen. Ces deux maîtres vont le marquer profondément.
Tony Aubin lui fera acquérir les techniques classiques, notamment dans le domaine de l'art du développement et de l'orchestration.
Olivier Messiaen va lui permettre de concilier en lui-même l'acquis oriental avec son origine occidentale. Il lui fera découvrir pour cela des oeuvres parmi les plus significatives de toutes les époques. Généreusement, il accueillera les découvertes de son élève dans ce matériau sonore venu de si loin dans l'espace et dans le temps. Messiaen lui ouvre également les portes de la civilisation occidentale par le regard neuf qu'il porte sur les textes et leurs auteurs : la Bible, St Thomas d'Aquin et les pères de l'Eglise, les grands penseurs et créateurs du 20ème siècle.
Il devient maître de chapelle et organiste titulaire de la chapelle St Benoît d'Issy-les-Moulineaux, ville où il réside désormais. Il occupera cette tribune pendant 22 ans.
1956
Il obtient le 1er prix de philosophie de la musique pour ses travaux Introduction à l'étude des lois de la musique de l'Inde.
1957
Jacques Charpentier entreprend un immense travail de composition consacré aux 72 modes karnatiques, modes qui constituent les échelles de base de la musique traditionnelle de l'Inde. Ils ont de particulier l'utilisation de toutes les positions possibles des 6 notes mobiles de la gamme de 7 sons choisis parmi les 12 degrés chromatiques.
Il s'agit pour Jacques Charpentier d'une entreprise monumentale : la composition des 72 études karnatiques. Cette véritable somme musicale, commencée en 1957 sera achevée en 1984.
1958
Il obtient le 1er prix de composition dans la classe de Tony Aubin pour sa Symphonie brève pour cordes (1ère symphonie).
Il est engagé par René Nicoly comme conférencier, pianiste et chef d'orchestre aux Jeunesses musicales de France (JMF). Il participera à ces titres à plus de 300 manifestations et concerts organisés en France et à l'étranger.
Période 1958-66
Il fréquente régulièrement l'organiste Marcel Dupré qui réside à Meudon. Il lui présente et interprète ses oeuvres d'orgue et se nourrit de ses rares et conseils avertis.
Il est nommé professeur au cours privé Les Enharmoniques, dirigé par Andrée Vicaire.
A la même époque, il effectue des suppléances aux cours d'écriture de Pierre Maillard Verger à la Schola Cantorum de Paris.
Il étudie le chant grégorien qu'il considère comme étant, avec des variables, la plus ancienne structure musicale commune aux peuples d'Europe. Il y voit des correspondances avec l'ensemble des musiques traditionnelles vocales du Bassin méditerranéen et considère qu'il s'agit là d'un art précieux susceptible de favoriser l'approche des civilisations musicales entre elles.
Il découvre les ondes Martenot et compose pour cet instrument des pièces solistes, deux concertos et, premier en date, un quatuor.
1960
Palma de Majorque (Espagne). Il préside le colloque international sur les nouvelles écritures musicales.
1961
Téhéran (Iran). Membre de la représentation française au Congrès international iranien de la musique Orient Occident de l'UNESCO.
Jérusalem (Israël). Membre de la représentation française au 1er Congrès international israélien de la musique Orient Occident de l'UNESCO.
1963
Il est nommé membre du bureau directeur du Centre d'études de musique orientale à l'Institut de musicologie de Paris.
Jérusalem (Israël).
Membre de la représentation française au 2ème Congrès international israélien de la musique Orient Occident de l'UNESCO.
L'Académie des Beaux-Arts - Institut de France lui décerne le Prix Georges Bizet.
1964
Maroc. Tournée de concerts et séjour d'études.
1966
Il reçoit le prix de composition de la fondation Koussevitsky de New York avec son oeuvre Mouvement pour flûte, violoncelle et harpe (1965).
Il est nommé au ministère chargé des Affaires culturelles sur proposition d'André Malraux.